dimanche 22 mars 2009

WATCHMEN- LES GARDIENS


J’étais plutôt méfiant face à cette adaptation du comics d’Alan Moore et Dave Gibbons, surtout à cause du précédent opus de Zack Snyder qui m’avait vraiment déçu. Les Spartiates huilés de 300 m’avaient profondément ennuyé, et c’est avec une certaine indifférence que je voyais se profiler la sortie de Watchmen. Les critiques dithyrambiques ne faisaient que renforcer ma méfiance, mais à force d’en entendre parler sans arrêt, et au vu d’une période cinématographique creuse, je me suis dis que j’allais tenter le coup. Ce que je ne regrette pas du tout !
Snyder aime les comics, et sa propension à privilégier une mise en scène stylisée se ressentait déjà dans son premier long L’Armée des Morts, énergique relecture du surévalué Zombie de Romero. Violent et vif, il remettait au goût du jour le mythe du mort-vivant (bien que Danny Boyle avait entamé le processus avec son 28 Jours plus tard, que les puristes les plus tatillons qualifieront de film d’infectés). Avec 300, Snyder transposait le comics de Frank Miller avec paraît-il une fidélité remarquable. Pour ma part, j’y ai surtout vu un très long clip avec des hommes musclés qui gueulaient et se mettaient sur la tronche dans des poses tellement iconiques que ça en devenait lassant. Cependant, le film témoignait d’une grande maîtrise visuelle dans la composition de ses tableaux, mais quelle vacuité…


D’où ma crainte d’être à nouveau déçu, et le soulagement de me rendre compte des qualités indéniables de son dernier film. N’ayant pas lu l’œuvre originale, je ne pourrais comparer les deux supports. Mais cinématographiquement, Watchmen s’avère d’une richesse étonnante et d’une grande maîtrise. Les ralentis totalement inutiles dans 300 possèdent ici une forte valeur narrative, le film traitant son sujet en insistant sur l’aspect temporel. Les montres et autres mécanismes d’horlogerie parsèment le film à intervalles réguliers jusqu’à donner au temps une réalité physique. Parallèlement à cela, Snyder prend son temps et développe son récit en 2h43 amplement utiles.



Un autre aspect qui pouvait faire peur au vu de la bande-annonce, c’est l’aspect ridicule des costumes. On ne peut pas dire que le Hibou ait la classe, et Ozymandias n’est pas un modèle d’élégance. Mais Snyder joue avec les conventions super-héroïques en détournant le spectateur de cet aspect et en lui proposant une plongée profonde dans ce qui fait la nature même du héros, au-delà du masque qu’il revêt. C’est là tout l’intérêt de ce film, qui explore avec intelligence la substantifique moelle du modèle costumé. Les failles humaines, les choix dramatiques, le scénario s’en sert pour construire une fiction dont les personnages seraient très crédibles même sans leur fonction de «masques ». On assiste donc à une histoire d’amour poignante, à des regrets et à de la culpabilité, et ce qui ressort le plus à la vision de ces personnages, c’est justement leur aspect humain. Même le plus inhumain d’entre eux, le Dr. Manhattan, révèle quelques sentiments malgré sa différence avec ses ex-équipiers.


L’aspect social développé par les scénaristes David Hayter (X-Men et X-Men 2) et Alex Tse bénéficie d’un contexte rétro-futuriste d’une très grande richesse, et les nombreux détails historiques détournés qui émaillent le film sont autant de points d’ancrage supplémentaires pour le réalisme des situations. Nixon en est à son 5ème mandat, la guerre du Vietnam a été rapidement expédiée, et la guerre froide est sur le point de déboucher sur un holocauste nucléaire. Une situation dramatique et un climat de paranoïa savamment retranscrit, dans lequel les anciens héros ont été contraints de ranger leurs costumes au placard pour ne pas devenir hors-la-loi (qui a dit Civil War ?). Un seul d’entre eux résiste, il s’agit du mystérieux Rorschach, qui est un personnage tout simplement génial. L’idée du masque blanc aux tâches noires mouvantes est excellente, mais sa complexité psychologique l’est tout autant. Dernier vigilante actif, il décide de retrouver ses anciens camarades lorsque le Comédien se fait assassiner.
Fréquenté par des acteurs très talentueux (Jackie Earle Haley et Jeffrey Dean Morgan en tête, respectivement dans les rôles de Rorschach et du Comédien), Watchmen est une réflexion étonnante sur le mythe du super-héros doublé d’une vision de l’humanité intense. Au-delà du blockbuster annoncé, c’est surtout un grand film donnant toute sa place à la condition de l’être humain.

9 commentaires:

  1. en effet c'est un excellent film(et l'adptation était des plus casse-gueule) mais pour ma part j'attendrai la version longue (qui sortira en dvd à la place de la version ciné d'après Snyder) pour en faire une critique.

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  2. Perso j'étais partant mais je me suis fait refoulé. Pour une fois que j'avais un a priori positif sur une adaptation... y'a pô de justice ! ;o)

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  3. Tiens, je n'étais pas au courant d'une version longue, uniquement de l'intégration du film d'animation sur les pirates, dont on trouve la BD dans Watchmen. En tous cas, suis assez d'accord avec cette chronique : un film respectueux et classe, manquant un peu d'ambition et légèrement trop clinquant, mais qui ne dénature que très peu le sujet en proposant une lecture plus aérée et accessible de cette découverte de leur toute-puissance par des Américains pourtant au bord du gouffre.

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  4. tu t'es fait refoulé Neault?? pourquoi,tu portais des baskets et ça a pas plu à l'ouvreur?? lol
    non sérieux il y avait tant de monde que ça?

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  5. Fallait pas y aller en tongs! T'as pu aller voir Coco au moins?

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  6. Si tu as aimé le film, tu devrais apprécier la bd. Fan de longue date d'Alan Moore, j'attendais cette adaptation de pied ferme. C'est plutôt réussi, même si je pense, comme Vance, que ça manque d'ambition et que ça clinque trop. Un coup de poing ne fait pas ce bruit, et la bd gagne en puissance en prenant les personnages pour ce qu'ils sont, à savoir des êtres humains. Et Dr Manhattan est vraiment trop chiant (mais déjà dans la bd...). Un réalisateur plus mûr eut été intéressant, mais moins passionné, c'est certain.

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  7. La BD ne m'attirait pas, mais après la vision du film je serai curieux de comparer les deux supports.

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  8. en ce qui concerne l'aspect ringard des costumes, j'ai trouvé le parti prit de pousser à fond dans ce sens trés bon, avec les flashback des minutemen. le film dans son ensemble m'a beaucoup impressionné, c'est trés rare désormais de voir des choses filmesques stimulantes, mais ce Watchmen est vraiment bon à mon goût.

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  9. L'idée des costumes est vraiment intéressante oui, parce que la ringardise du premier abord est dynamitée par les personnalités des héros. Cette contradiction colle bien avec la complexité du film.

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