lundi 16 février 2009

FROZEN RIVER


Ce premier film de la réalisatrice américaine Courtney Hunt remporte tous les suffrages partout où il passe: de Sundance à Genève, de Hambourg à Marrakech, il est aussi nominé aux prochains Oscars et devrait poursuivre sa route dans les festivals. Sorti en France le 7 janvier, il est actuellement programmé dans le circuit art et essai.
La bande-annonce laissait présager d’un film où prédomine une ambiance atmosphérique, suivant les pas d’une mère de famille esseulée essayant de survivre et de gagner de l’argent. Mais la poésie annoncée fait place à une vision beaucoup plus frontale et déshumanisée, filmant ses personnages à vif à l’aide d’une DV pour un rendu plus réaliste. Et «Le thriller le plus excitant de l’année… A vous couper le souffle! » selon Quentin Tarantino, ça sonne vraiment comme une publicité mensongère. Frozen River n’a rien d’un trhiller, mais est une chronique sociale tout ce qu’il y a de plus classique, malheureusement plombée par une approche trop feutrée pour éveiller la moindre émotion.

Le choix de la lenteur et du silence n’est pas toujours le meilleur, et c’est ce qui plombe le récit de Frozen River. En suivant la trace de deux femmes marquées par l’existence, Courtney Hunt tient à montrer comment on peut basculer progressivement dans l’illégalité afin de survivre. Mais la concision des dialogues alliée à une mise en scène très froide (et non pas distante, Courtney Hunt collant aux basques de ses actrices) place le spectateur en retrait, et l’oblige à suivre l’histoire sans ressentir d’émotion. Melissa Leo joue plutôt bien son personnage de femme brisée, mais la vision de Courtney Hunt est davantage centrée sur une approche film d’auteur qu’émotionnelle. Il n’y a pas de pathos, mais au contraire une distance très marquée vis-à-vis des sentiments, et seul son fils T.J. (joué par le très bon Charlie McDermott) réveille un peu la torpeur dans laquelle s’englue le film.
L’histoire de cette femme décidant de faire passer la frontière canadienne à des sans-papiers possédait pourtant un fort potentiel dramatique, et ouvrait sur des possibilités cinématographiques captivantes. Mais l’utilisation même des lieux n’apporte pas ce souffle visuel auquel on pouvait s’attendre, et mis à part les plans de traversée de la rivière gelée, Courtney Hunt ne s’intéresse pas à la nature environnante et à l’énergie qu’elle aurait pu amener au film. Elle reste focalisée sur ses personnages et sur leurs problèmes en les isolant de cette nature sauvage, et Frozen River ne reste qu’un énième drame social ennuyeux.

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