samedi 28 février 2009

BANLIEUE 13 ULTIMATUM


Il y a 5 ans, Banlieue 13 faisait l’effet d’un électrochoc dans le paysage cinématographique français : un pur film d’action bien de chez nous qui nous gratifiait de séquences hallucinantes concoctées par deux athlètes hors norme, David Belle et Cyril Raffaelli. Le premier est l’initiateur du Parkour, discipline physique modifiant totalement la perception de l’environnement urbain, puisque chaque obstacle est un nouveau défi. Le second est un adepte des arts martiaux dès l’âge de 6 ans, et maîtrise le nunchaku, le karaté et le kung-fu, en y ajoutant une pincée d’acrobatie héritée du cirque d’Annie Fratellini. En conjuguant leurs talents dans Banlieue 13, ils ont créé un film aux scènes d’action totalement novatrices et au rythme haletant.
Une suite était depuis longtemps envisagée, et elle arrive enfin sur les écrans. Banlieue 13 Ultimatum se déroule 3 ans après les faits, et voit un gouvernement changé mais une situation politique toujours au bord du chaos. Le mur délimitant la banlieue 13 est encore debout ( référence avouée à New York 1997) et chaque ethnie investit son propre territoire. Blacks, asiatiques, Musulmans… La banlieue est devenue un véritable ghetto dans lequel l’économie souterraine fonctionne à plein régime. Mais un groupe industriel va s’allier avec une branche radicale de l’autorité afin de faire imploser la cité, pour mieux la faire exploser ensuite à gros coups de bombes…


Même concept et mêmes enjeux pour ce Banlieue 13 deuxième du nom, qui voit donc le flic Damien Tomaso et le banlieusard Leïto unir à nouveau leurs forces afin de contrecarrer les plans des extrémistes. Au-delà du plaisir de retrouver les deux lascars en grande forme, cette suite se la joue quand même plus soft que le premier opus. Les scènes d’action sont plus dispersées, mais elles n’en sont pas moins percutantes. Le combat du début avec le Van Gogh est un hommage certain aux Jackie Chan de la grande époque, saupoudré d’un modernisme à la Tony Jaa bien senti. La scène est bien violente et à couper le souffle, avec l’utilisation de la toile de maître donnant lieu à un humour bien efficace.
En fait, le gros souci de cette suite réside dans son scénario, qui est franchement très lourd d’un point de vue politique et social. Luc Besson n’est pas connu pour faire dans le subtil (qui a dit Taxi 4 ? Qui a dit Le Transporteur 3 ?), mais on atteint ici un niveau vraiment très gênant. La facilité avec laquelle chaque ethnie accepte de s’allier aux autres pour sauver la cité ressemble à un rebondissement de dessin animé (un skin combattant aux côtés d’un Muslim et d’un Black sans se poser de questions, c’est vraiment un concept étrange…). Mais le pire, ce sont les raccourcis scénaristiques concernant les enjeux politiques : Philippe Torreton incarne un Président totalement dépassé et se retrouvant seul afin de lutter contre les pressions de ses subalternes qui veulent nettoyer le quartier. C’est d’un manichéisme assez hallucinant, même pour un film centré davantage sur l’action que sur la réflexion. La fin atteint un niveau jamais égalé dans le n’importe quoi, et c’est impossible de trouver des circonstances atténuantes pour justifier un point de vue moralement plus que douteux.


L’erreur de Banlieue 13 Ultimatum est d’avoir voulu implanter une vision politique plus importante que dans le premier, qui se suffisait en tant que film d’action. Ici, les arcanes du pouvoir sont ronflants et tentent de s’entourer d’une aura de mystère et de paranoïa qui ne fonctionne pas. Alors que si on avait laissé le champ libre à Belle et Raffaelli, on aurait sûrement eu droit à plus de scènes explosives. Banlieue 13 Ultimatum ne réitère donc pas l’exploit de son prédécesseur, mais se dilue dans une vision exécrable et totalement simpliste du problème. C’est vraiment dommage, surtout au vu des scènes de poursuites et de combat plutôt bien foutues. Patrick Allesandrin prouve qu’il peut faire autre chose que des comédies gentillettes (15 Août, Mauvais Esprit), et même s’il n’est pas aussi inspiré que Pierre Morel sur le premier, il livre des séquences intéressantes. Le concept même du film de science-fiction est appliqué avec soin, et se tient visuellement. Il est vraiment dommage alors qu’il soit plombé par des résonnances politiques à 2 balles qui font plus de ravages sur le film lui-même que dans la banlieue 13 du récit.
Il faudrait maintenant que des scénaristes talentueux permettent à david Belle et Cyril Raffaelli de prouver tout leur potentiel dans des bandes nerveuses et violentes. Et je suis certain que c’est possible, même en France…

dimanche 22 février 2009

THE WRESTLER


The Wrestler est un film exigeant ; tout d’abord avec son acteur principal qui se dévoile pleinement et qui mêle inextricablement sa vie privée à celle du héros fictif ; il est exigeant pour son réalisateur qui modifie totalement son approche de la mise en scène, laissant de côté les expérimentations visuelles de ses précédentes œuvres afin de coller au plus près de son personnage ; et il est également exigeant pour le spectateur qui doit accepter d’entrer dans cet univers âpre afin d’en retirer l’émotion.
Impossible de ne pas voir The Wrestler comme un documentaire sur l’acteur Mickey Rourke. Le lien très fort unissant la star déchue et le catcheur vieillissant est indéniable, offrant à l’acteur un film en forme de chant du cygne, qui semble paradoxalement destiné à lui ouvrir les portes d’une seconde carrière. La performance de Mickey Rourke est marquante, et il utilise sa gueule burinée et son corps ravagé pour mieux montrer sa souffrance. Une souffrance physique dans laquelle il tente d’échapper à celles plus profondes qui lui torturent l’esprit. Rourke est un survivant, tout comme son personnage, Randy « le Bélier » Robinson.




Darren Aronofsky s’éloigne de la poésie sombre qu’il utilisait de manière différente dans chacun de ses films (expérimentale dans Pi, glauque dans Requiem for a Dream, déchirante dans The Fountain), et se rapproche d’un cinéma social finalement très proche des frères Dardenne, comme on a pu le lire dans diverses critiques. Ce n’est pas sans raison, car sa réalisation colle constamment au personnage et évite tout effet spectaculaire pour un rendu le plus réaliste possible. Randy Robinson pourrait être l’oncle d’Amérique de la Rosetta des frangins belges, les deux personnages se débattant dans une existence qui les broie et dans laquelle ils se débattent.



Il faut bien évidemment se dire que l’on ne va pas assister à un film sur le catch, et les fans de Randy Orton et Batista risquent de faire la tronche en sortant. The Wrestler est avant tout un film sur le déclin et la vieillesse, sur l’usure et la volonté de s’en sortir. L’approche est parfois répétitive, mais Mickey Rourke est entouré par deux excellentes actrices : la sublime et trop rare Marisa Tomei et la touchante Evan Rachel Wood. La danseuse érotique et la fille délaissée, les deux figures féminines qui permettent à Randy de garder la tête hors de l’eau. La relation entre le catcheur usé et la danseuse fatiguée crée une émotion particulière, et celle orageuse entre le père et la fille est elle aussi très intense. A tel point qu’il est dommage que le scénario ne leur réserve pas plus de place.
The Wrestler est un drame social brut et touchant, mais je ne peux m’empêcher de m’imaginer ce qu’il aurait donné s’il avait été tourné à la manière de The Fountain ou Requiem of a Dream. Les derniers plans du film laissent entrapercevoir cette idée, et l’on retrouve l’espace d’un instant la poésie visuelle chère à Aronofsky.

mercredi 18 février 2009

BIENVENUE AU COTTAGE


Sorti le 4 février en DVD, ce film anglais de Paul Andrew Williams tente de surfer sur la nouvelle vague de comédies horrifiques ayant démarré chez sa Majesté en 2004 avec l'inégalable Shaun of the Dead. Mais on est bien loin du film dément réalisé par Edgar Wright, et Bienvenue au Cottage s’apparente davantage à une version très poussive d’un film d’otage mâtiné sur le tard d’un peu de Massacre à la Tronçonneuse.
Le premier problème tient dans l’élaboration des personnages, qui sont tout sauf drôles. Les dialogues sont d’une banalité affligeante, et les répétitions ne font qu’accentuer l’impression de théâtralité qui se dégage des situations. La mise en scène est très homogène, puisqu’elle se contente de cadrer les acteurs en gros plan, avec une constante irritante qui semble être un plagiat de Côte Ouest: le cadrage des deux acteurs principaux avec l’un en arrière-plan et l’autre au second plan fait constamment penser aux soaps américains, et ce statisme renforce considérablement l’impression d’assister à une transposition de pièce de théâtre. Andy Serkis a une sacrée gueule d’acteur (c’est lui qui «incarnait» Gollum dans la trilogie de l’Anneau et King Kong dans la version de Peter Jackson), mais la faible caractérisation de son personnage ne lui rend pas justice. Reece Shearsmith incarne la seconde petite frappe, et ne bénéficie pas d’une écriture plus élaborée.


Jennifer Ellison s’avère être le personnage le plus intéressant, et pas seulement parce qu’elle est une blonde à forte poitrine. Elle possède une personnalité bien relevée qui va donner du fil à retordre à ses deux ravisseurs, mais son côté percutant (elle manie le coup de boule avec grâce) va se diluer peu à peu dans une intrigue qui n’avance pas. Son personnage finit par se réduire à sa plastique plus qu’avantageuse, ce qui est très dommage au vu du potentiel de départ.
Les deux ravisseurs se retrouvent donc avec leur otage blonde dans un cottage où ils vont passer le plus clair de leur temps, et le spectateur va s’ennuyer avec eux. Les semblants d’intrigue qui se dessinent n’apportent rien au déroulement de l’histoire, et ce n’est que dans la dernière demi-heure que le film sort enfin de ce carcan réducteur et trop bavard pour entrer dans le territoire du gore qui tache. Et là, on assiste à un léger sursaut avec un personnage hideux qui se la joue Leatherface, mais la lourdeur de l’humour accompagnant son petit jeu de massacre ralentit même cette dernière partie. On est donc très loin du génial Shaun of the Dead, et on ne se rapproche même pas du modeste mais réussi Severance.

lundi 16 février 2009

FROZEN RIVER


Ce premier film de la réalisatrice américaine Courtney Hunt remporte tous les suffrages partout où il passe: de Sundance à Genève, de Hambourg à Marrakech, il est aussi nominé aux prochains Oscars et devrait poursuivre sa route dans les festivals. Sorti en France le 7 janvier, il est actuellement programmé dans le circuit art et essai.
La bande-annonce laissait présager d’un film où prédomine une ambiance atmosphérique, suivant les pas d’une mère de famille esseulée essayant de survivre et de gagner de l’argent. Mais la poésie annoncée fait place à une vision beaucoup plus frontale et déshumanisée, filmant ses personnages à vif à l’aide d’une DV pour un rendu plus réaliste. Et «Le thriller le plus excitant de l’année… A vous couper le souffle! » selon Quentin Tarantino, ça sonne vraiment comme une publicité mensongère. Frozen River n’a rien d’un trhiller, mais est une chronique sociale tout ce qu’il y a de plus classique, malheureusement plombée par une approche trop feutrée pour éveiller la moindre émotion.

Le choix de la lenteur et du silence n’est pas toujours le meilleur, et c’est ce qui plombe le récit de Frozen River. En suivant la trace de deux femmes marquées par l’existence, Courtney Hunt tient à montrer comment on peut basculer progressivement dans l’illégalité afin de survivre. Mais la concision des dialogues alliée à une mise en scène très froide (et non pas distante, Courtney Hunt collant aux basques de ses actrices) place le spectateur en retrait, et l’oblige à suivre l’histoire sans ressentir d’émotion. Melissa Leo joue plutôt bien son personnage de femme brisée, mais la vision de Courtney Hunt est davantage centrée sur une approche film d’auteur qu’émotionnelle. Il n’y a pas de pathos, mais au contraire une distance très marquée vis-à-vis des sentiments, et seul son fils T.J. (joué par le très bon Charlie McDermott) réveille un peu la torpeur dans laquelle s’englue le film.
L’histoire de cette femme décidant de faire passer la frontière canadienne à des sans-papiers possédait pourtant un fort potentiel dramatique, et ouvrait sur des possibilités cinématographiques captivantes. Mais l’utilisation même des lieux n’apporte pas ce souffle visuel auquel on pouvait s’attendre, et mis à part les plans de traversée de la rivière gelée, Courtney Hunt ne s’intéresse pas à la nature environnante et à l’énergie qu’elle aurait pu amener au film. Elle reste focalisée sur ses personnages et sur leurs problèmes en les isolant de cette nature sauvage, et Frozen River ne reste qu’un énième drame social ennuyeux.

samedi 14 février 2009

VENDREDI 13


Même si je n’aime pas l’ambiance malsaine et gore de son remake de Massacre à la Tronçonneuse, il faut reconnaître que Marcus Nispel y a injecté un sens indéniable de la mise en scène. Son Pathfinder charcuté fait montre d’une même efficacité, et constituait un film barbare de bonne facture. C’est dire que la venue du réalisateur allemand sur le relaunch de Vendredi 13 était prometteuse…
Et là, l’incompréhension. Ce film aurait pu être réalisé par n’importe qui tant sa mise en scène est neutre et sans âme. Même les plans censées être iconiques tombent à plat (Jason en contre-plongée sur le toit), et ce Vendredi 13 cuvée 2009 n’a rien à offrir en terme visuel. Un comble pour un film destiné à relancer l’un des boogeymen les plus légendaires du 7ème art. Marcus Nispel filme des jeunes qui se promènent la nuit avec des lampes torches, dans une ambiance faussement crade et totalement factice. C’est simple, on imagine toujours les techniciens qui se trouvent hors champ en train de bouffer leur casse-dalle et de siroter une petite bière. Le casting n’aide pas vraiment à sauver l’entreprise, puisque les jeunes sont complètement insignifiants. De jeunes éphèbes et des apprenties bimbos, ce qui aurait pu être vraiment fun si le scénario l’avait joué roublard et décalé. Mais non, on reste très premier degré finalement, avec des vannes bien foireuses et un statisme plus qu’inquiétant. C’est bien simple, il ne se passe rien pendant 1h27 qui semble durer 3 heures. Au lieu de nous servir un revival qui charcle et bourré de tension, Nispel filme un pur produit de studio destiné au plus grand nombre (l’interdiction aux moins de 12 ans est parlante), et Jason se retrouve dans une sale position: loin de sons statut de tueur sanguinaire, il est le fer de lance de la nouvelle vision horrifique made in USA consistant à édulcorer les films afin de pouvoir rentabiliser au maximum en salles et en DVD. Nul doute que Jason parviendra à engranger des billets verts, au moins sur le dos des fans de la première heure, mais on est très loin du résultat attendu.



Comme pour l’excellent Halloween de Rob Zombie, le choix de l’acteur pour incarner le Mal était crucial. Et le colosse Derek Mears promettait de recréer une figure emblématique en y ajoutant une bonne dose de testostérone. Mais rien n’y fait, et Jason est insignifiant. Sans même parler de psychologie, la nature même de son rôle est totalement vaine. Sauf exception pour le pré-générique qui claque, on pourrait aisément remplacer Jason par n’importe qui d’autre. La particularité du masque et de la machette ne fait ici office que de gimmick, et les scénaristes Damian Shannon, Mark Swift et Mark Weathon n’offrent aucune portée dramatique au personnage. Ah, on me signale que Shannon et Swift étaient en charge de l’écriture du catastrophique Freddy contre Jason… J’avoue que tout est beaucoup plus clair maintenant…
A quoi ça sert de faire un remake si on n’y apporte aucune innovation et aucune modernisation? Vendredi 13 ne parvient même pas à recréer l’ambiance estivale sexy des sympathiques bandes 80‘s, sans parler de l'absence cruelle de tension... Il n’y a absolument rien à sauver dans cette tentative, mis à part 5 minutes lors du premier massacre. Ca fait cher le ticket de cinéma… Et ça fait mal de voir l’un des mythes de l’horreur 80’s se faire détruire en toute impunité…

mercredi 11 février 2009

MORSE






Après l’avoir raté au festival de Gérardmer, voilà que Morse débarque dans les salles le 4 février, soit juste après avoir raflé le Grand Prix. Bon, sortir dans les salles,c’est un grand mot, car en Alsace ça ressemble plutôt à une sortie technique, puisqu’il ne passe que dans une seule salle. La rançon du succès… Après on s’étonne que le téléchargement cartonne… Bref, j’ai pu voir Morse, l’un des films les plus intrigants du festival. Une relation amoureuse entre un souffre-douleur et une vampirette de 12 ans, une ambiance lourde et contemplative, la fraîcheur des territoires nordiques…
Et bien c’est une très grosse déception. Tout d’abord, le jeune blond tout droit sorti de son paquet de Kinder devient rapidement une tête-à-claques, et l’aspect éthéré de son physique allié à celui de la réalisation vont progressivement créer un climat très film d’auteur, lent et avare de paroles. La poésie qui se dégage par moments se retrouve atténuée par cette mise en scène engourdissante, et ne permet pas au récit de décoller. Pourtant, la relation entre les deux enfants possédait un fort potentiel, et surtout, la jeune Lina Leandersson joue le rôle de la mystérieuse Eli avec un réel talent. Elle sait être à la fois douce, inquiétante et flippante. Mais l’alchimie ne prend pas avec son partenaire, ce qui est plutôt fâcheux dans une histoire d’amour. L’aspect vampirique est quant à lui bien exploité, par la découverte progressive des capacités d’Eli, et la malédiction pesant sur elle apparaît nettement. Même si elle n’est pas explicitée dans les dialogues, la solitude du vampire est claire, liée à un dégoût de ses propres actes. Eli fait souffrir les autres, mais elle souffre également de sa condition particulière.




Tomas Alfredson a œuvré de nombreuses années à la télévision, et son passage sur grand écran est relativement récent. Morse lui a amené une consécration que je trouve largement surestimée, même si l’élémént le plus faible du film reste le scénario. C’est John Ajvide Lindqvist qui adapte son propre roman, mais le récit est habité par des personnages sans saveur (sauf Eli, encore une fois) et en ressort amoindri.
Morse est typiquement un film de festival, avec sa narration lente et l’originalité de son traitement du mythe vampirique, mais il reste englué dans cette vision très statique et ne parvient pas à faire ressortir de véritable émotion. Par contre, un sentiment diffus de malaise plane tout le long du film, et flirte avec une sexualité enfantine pas forcément nécessaire. Morse est un film très décevant, et son Grand Prix rappelle à quel point le jury reste frileux: l’an dernier, c’est aussi un film très visuel mais au contenu faible qui avait gagné, L’Orphelinat. Alors que l’ultra-bourrin [REC] le méritait largement et se contentait du Prix du Jury. Mais ce n’est pas avec une distribution aussi étendue que le film de Tomas Alfredson va trouver un public…

lundi 9 février 2009

GERARDMER 2009: COLD PREY 2



Dernier film de cette journée géromoise, Cold Prey 2 qui nous permet de retrouver le sympathique tueur à la pioche juste après avoir découvert ses aventures dans le premier opus. On enchaîne directement là où les choses se sont arrêtées dans Cold Prey et on continue le massacre dans un nouveau lieu. Exit l’hôtel abandonné du premier film, cette fois-ci l’action prend place dans un hôpital.
La trame reprend le concept du classique Halloween 2 de Rick Rosenthal (et officieusement John Carpenter qui aurait rempilé afin de rattraper les approximations du réalisateur crédité), qui voyait Michael Myers hanter les couloirs glacés d’un hosto en massacrant tout ceux qu’il trouvait sur son passage. Le lien avec la célèbre saga est encore plus clair lorsqu’on s’aperçoit de la modification radicale de la perception du tueur par rapport au premier film; figure fantomatique et mystérieuse dans Cold Prey, il acquière définitivement le statut de boogeyman dans ce deuxième film. Arme fétiche, retour d’entre les morts, massacre consciencieux sans prendre la peine de courir… Oui, on a bien affaire à un cousin dégénéré de Jason et Freddy, agrémenté à la sauce nordique.


Le film de Mats Sternberg (sorti au pays en 2008, et en France en 2042) est donc une suite qui ne colle pas aux basques de son prédécesseur puisqu’il propose un récit beaucoup plus fun et balisé. La particularité norvégienne qui donnait sa tonalité au premier film est plus diffuse, et la saga s’américanise tranquillement. Mais Cold Prey 2 n’est pas pour autant un rejeton à éviter. Il bénéficie toujours de l’aura et de l’expérience de Roar Uthaug (réal du premier), qui assure ici l’écriture avec Martin Sundland (déjà en poste sur le premier) et qui est également producteur. Autant dire qu’il surveille son bébé et qu’il ne le laisse pas partir à la déroute.
Cold Prey 2 va donc jouer la carte du slasher jouissif en intégrant de nouveaux personnages (reste-t-il des survivants au premier?) qui vont connaître les joies du coup de pioche et des courses effrénées dans les longs couloirs aseptisés. Mats Stenberg est bien guidé par Uthaug, la mise en scène se calquant sur celle du premier opus. Percutante et tendue, elle permet de créer une ambiance bien crispante et cadre ses personnages avec le même soin que pour le premier Fritt Viltt (j’adore le titre original, j'aime quand ça roule sous la langue!).
Cold Prey 2 ne bénéficie plus de la fraîcheur de Cold Prey et de son originalité percutante, mais la continuité se fait avec toujours le même respect pour le genre horrifique. Il constitue une suite de très bonne facture et laisse planer le fantasme sur ce qui pourrait devenir une petite franchise bien vénère et fun. Allez Roar, on compte sur toi!

dimanche 8 février 2009

GERARDMER 2009: COLD PREY


Le 5ème film de ce dimanche 1er février (une semaine déjà!) est celui que j’attendais avec le plus d’impatience. Pourtant, il n’est ni en compétition, ni très récent (il date de 2006), mais il est précédé d’une réputation plus que flatteuse, et d’une bande-annonce qui donne sacrément envie. Pour la petite histoire, ce film est inédit dans les salles françaises, mais Canal + a la bonne idée de le diffuser en ce moment. Tous à vos décodeurs pirates!
Jannicke, Eirik, Mikael, Ingunn et Morten Tobias partent s’éclater dans les montagnes norvégiennes. Ces passionnés de snowboard décident de s’aventurer dans un endroit où les touristes ne risquent pas de les déranger, et ils sont bien résolus à profiter pleinement de la neige abondante et du soleil éclatant. Mais lorsque Morten Tobias chute et se fait une sale fracture, les 5 amis sont obligés d’arrêter leur virée. L’après-midi touche à sa fin, et ils n’auront pas le temps de redescendre à la voiture. Heureusement, ils vont pouvoir trouver refuge dans un hôtel abandonné…



Cold Prey est bien LA grosse claque norvégienne annoncée en matière de slasher. D’entrée de jeu, la beauté des paysages nordiques fascine et génère un arrière-plan très caractéristique et très dense. L’immensité des lieux va progressivement écraser le petit groupe, et même s’il est dommage que le film ne se réserve pas beaucoup de scènes extérieures une fois le massacre commencé, la dimension tragique et oppressante qu’apporte ce lieu désolé n’est pas sans rappeler le Shining de Kubrick.
L’hôtel déserté est le lieu où le cauchemar va se dérouler, et la première vision que le spectateur en a va évidemment être marquée par une architecture inquiétante et le poids d’un lourd passé (l‘esprit de Shining est encore une fois très présent). Sa situation cachée (il se trouve sur le flanc arrière d’une colline) et son aspect vétuste n’ont rien d’encourageant, mais il constitue l’unique abri possible à des kilomètres à la ronde. Les cinq amis décident donc de s’y installer pour la nuit, à l’abri du vent et du froid.


Ce premier long de Roar Uthaug après 3 courts métrages bénéficie d’un scénario s'intéressant particulièrement à ses personnages, qui sont caractérisés avec beaucoup de réalisme, et dont la construction permet au spectateur de totalement s’identifier à eux. Uthaug a partagé l’écriture avec Thomas Moldestad et Martin Sundland, et les trois hommes ont réussi à donner naissance à un groupe de jeunes réellement intéressant et servi par un excellent casting. Dans le genre, on pourrait le comparer avec la qualité des personnages de jeunes de Wolf Creek, très écrits et très loin de la rigidité habituelle des films d’horreur. Mais Cold Prey va plus loin que le film surestimé de Greg McLean, qui s’essouffle rapidement lorsque le charcutage commence, principalement à cause d’un bad guy désastreux. Celui de Cold Prey reste très mystérieux et percutant; la première mise à mort est bien brutale et promet une suite très tendue. De plus, elle intervient après que les 5 amis aient tranquillement pris possession des lieux et qu’ils se trouvent à l’aise dans leur nouveau logis. Toute la partie durant laquelle ils visitent l’endroit permet de mettre en place une angoisse sourde, qui ne va cesser de grandir. Comme si leur intrusion dans cet hôtel allait peu à peu réveiller ce qui y est tapi…


Roar Uthaug possède un très fort sens de la mise en scène, et il applique une graduation de la tension véritablement exemplaire. Au-delà du pur argument exotique du film norvégien, son film est traité avec un sens consommé de la culture du slasher et une maîtrise totale du rythme inhérent au genre. Cold Prey est flippant, et il travaille le spectateur au corps en le soumettant à une tension constante. L’utilisation du son (notamment les pas lourds du mystérieux tueur) est elle aussi exemplaire et joue beaucoup dans l’angoisse générée par ce film. Uthaug lie inextricablement tous les éléments afin de mettre le spectateur sur les nerfs, et ça fonctionne vraiment très bien. La violence est très directe, et Uthaug la rend graphiquement très belle et tragique. Notamment lorsque -censuré- se fait étriper à 2 pas de ses amis… Le réalisateur parvient à rendre ce moment viscéral par la cruauté même de la situation et son absurdité: si la musique ne couvrait pas les cris, la victime serait peut-être encore en vie…
Jusqu’à une fin véritablement iconique où… Bon je balancerai pas, mais un slasher qui parvient à se terminer sans se mordre la queue, c’est ce qu’on appelle un bon slasher. Et Roar Uthaug en a réalisé un 4 étoiles. D’ici a ce que les Ricains en fassent un remake, il n’y a qu’un pas. Mais ne vous laissez pas abuser par le réchauffé, et si vous pouvez voir ce magnifique Cold Prey, n’hésitez pas. Il renouvelle le genre en sublimant les figures imposées, et ça fait vraiment plaisir de frissonner comme ça, et pas seulement à cause de la neige!

vendredi 6 février 2009

GERARDMER 2009: GRACE



Il est 16h15, et nous entamons la deuxième moitié de notre journée cinéphilique. Notre quatrième film est un premier long métrage réalisé par Paul Solet, qui a quand même eu la chance de diriger Bruce Campbell dans son court Fangoria: Blood Drive II, segment d’une anthologie de 8 courts. Avec Grace, Solet nous fait sa propre version du Monstre est vivant en axant sa dramaturgie principalement sur la figure torturée de la mère.
Tout commence par une femme déterminée à être enceinte, mais qui perd son enfant suite à un accident. Lorsqu’elle accouche 3 semaines plus tard, le bébé revient miraculeusement à la vie. Un point de départ aussi inquiétant qu’intriguant, filmé avec une volonté de réalisme acharné tendant vers un côté Douglas Buck très prononcé. La comparaison n’est pas gratuite, car Solet va dérouler un véritable récit maladif, se complaisant dans une atmosphère délétère et une imagerie glauque à souhait. Grace est une descente aux enfers psychologique, que son réalisateur tient à pousser dans ses derniers retranchements (ci-dessous, on pourrait croire que c'est Michael Scofield, mais non, c'est Paul Solet).


Si l’on aime les images de bébé buveur de sang et d’hémoglobine remplissant les biberons, on peut trouver son compte à la vue de ce film à la perversion très poussée. Pour ma part, le spectacle était plutôt insoutenable et j’avais hâte que la séance se termine. Grace fait partie de ces films malades chers à Douglas Buck ou Gaspar Noé, ce que j’ai plutôt tendance à éviter. Je me doutais bien que je n’allais pas assister à 3 Hommes et un couffin, mais ça surprend quand même…
Grace bénéficie pourtant d’un sens visuel intéressant au départ, mais qui va rapidement se diluer dans une imagerie morbide trop complaisante. La vision de cette femme flirtant avec la folie est difficile à supporter, même si Jordan Ladd (Cabin Fever, Hostel 2) est très convaincante.


Il faut noter qu’avant de réaliser ce long, Paul Solet a mis en scène un court nommé Grace qui relatait le même thème, avec Brian Austin Green (Daviiiiiiiiiiiiiid!). Ca durait 6 minutes, ça devait être sympa. Grace a quand même obtenu le Prix du Jury, c’est que les jurés ont sûrement le coeur plus accroché que moi!

jeudi 5 février 2009

GERARDMER 2009: HUSH



Le scénariste et comédien anglais Mark Tonderai passe derrière la caméra pour ce thriller efficace porté par deux acteurs sympathiques, William Ash et Christine Bottomley. Lorsqu’il se fait doubler sur l’autoroute, Zakes voit la porte arrière d’un camion s’ouvrir un bref instant, et il a la vision d’une femme nue hurlant derrière une grille. Il fait nuit, la pluie battante inonde le sol, mais Zakes est persuadé de ce qu’il a vu. Après en avoir fait part à sa copine Beth, il décide d’appeler les flics et de continuer sa route. Mais après un arrêt à la station-service, Zakes se rend compte que Beth a disparu. Et lorsqu’il voit le même camion regagner l’autoroute, il comprend que sa copine vient de se faire enlever…


Hush est un petit film de série B jouant sur une tension permanente, et se basant sur un pitch mince mais allant à l’essentiel. Zakes va tenter de suivre le camion et de retrouver Beth, et le film emprunte des airs de Duel plutôt bienvenus. La caractérisation du méchant par son véhicule même est très intelligente, et la vision du routier lui donne des allures de boogeyman collant bien avec l’esprit fun du film. Hush est une sorte d’exercice de style convoquant des figures du slasher et du thriller, pour donner un résultat parfois académique mais toujours convaincant. La scène des toilettes est à ce titre exemplaire, en étant un passage obligé du genre, tout en conservant une tension certaine grâce à une mise en scène efficace et un découpage très précis. Le film de Tonderai ne se prend pas pour un modèle du genre, mais est tourné avec une réelle modestie et une véritable connaissance éclairée. Tonderai sait varier les effets en intégrant un peu d’humour dans cette tension permanente, et même s’il n’est pas exempt de défauts (la fin est quand même trop longue), son film est une petite bouffée d’air frais dans le genre. Produit par les studios Warp X, ce film bénéficie d’une musique électro particulièrement captivante. Normal, le studio est une filiale du célèbre label techno anglais Warp qui produit Aphex Twin et autre Squarepusher. Le son est redoutablement efficace et Tonderai sait le placer intelligemment pour accompagner la tension de sa mise en scène.
Le personnage principal va bien morfler, psychologiquement et physiquement, et c’est le principe même de l’instinct de survie qui est intéressant dans ce film. Sa volonté de retrouver sa copine va le pousser à commettre des actes qu’il n’aurait jamais pensé faire, et le scénario va bien le malmener. La mise en scène de Tonderai va exploiter le potentiel de chaque scène pour en tirer un suspense réussi, et l’ensemble est franchement fun.

mardi 3 février 2009

GERARDMER 2009: MUTANTS


Première et unique déconvenue de la journée: l’impossibilité d’accéder à la projection de Morse (enfin, il y a aussi la serveuse antipathique qui aurait bien voulu qu’on commande un Dom Pérignon pour accompagner nos crêpes à 8 euros, mais ça c’est une autre histoire…). Lionel Luthor et moi nous rabattons sur le film français Mutants de David Morley, qui touche au long métrage pour la première fois après son court Morsure. Morley s’attaque au film de zombie avec une réelle envie et un amour certain du genre.
Le début met tout de suite dans l’ambiance avec cette jeune femme en fuite à travers la forêt, et avec la scène de l’ambulance où Hélène de Fougerolles et Francis Renaud tentent de garder en vie un flic ensanglanté. L’ambulance fonce à travers les routes de montagne et la tension est immédiatement palpable. Contamination, décimation, infectés, tous les éléments du film apocalyptique sont là et posent une ambiance lourde dès le départ. La musique techno accompagnant les plans très stylisés de Morley laisse augurer d’un bon film de genre bien fun bourré d’action.




Mais Morley va s’aventurer sur un terrain beaucoup plus radical et beaucoup moins intéressant en axant la première partie de son métrage sur une histoire d’amour à travers la maladie. C’est hyper glauque et malsain, avec des scènes très longues où l’infecté pisse du sang, perd ses cheveux, ses dents, etc. On est en fait face à une vision très crue d’un cas de maladie, et ça n’est vraiment pas agréable à regarder. Les effets sont très réalistes, mais Morley film tout ça avec une vraie envie de mettre mal à l’aise, et ça marche. Et c’est ce qui fait décrocher aussi, puisque les films glauques, c’est vraiment pas mon truc.
Cette première partie éprouvante va être suivie par une relecture de La Nuit des Morts vivants qui conservera cette ambiance poisseuse et crade, faisant de Mutants une sorte de film maladif plutôt qu’un spectacle fun. Et là, encore une fois, c’est pas ma came. La mise en scène de Morley est plutôt efficace, ressassant des idées à la Resident Evil (les jeux!) en respectant une certaine esthétique froide. Mais les personnages sont d’un intérêt plus que minimes, et mis à part Hélène de Fougerolles qui est vraiment bien, le reste du casting ne permet pas d’appliquer un processus d’identification qui est la base même de la réussite de ce genre de film. Mutants est visuellement beau, avec des créatures abominables aux maquillages saisissants (on pense invariablement aux vampires de 30 Jours de Nuit), mais le scénario bancal et l’aspect résolument malsain de l’ensemble privent le spectateur d’un film qui aurait pu s’avérer particulièrement jouissif et novateur dans le paysage fantastique français.

lundi 2 février 2009

GERARDMER 2009: DEADGIRL

Dimanche 1er février, 8h20. Lionel Luthor et moi arrivons à Gérardmer après un périple à travers la montagne, et nous nous précipitons vers la billetterie afin de retirer le fameux pass qui nous permettra d’accéder à ce monde étrange qu’est Fantastic’Arts. 16ème du nom, ce festival est encore une fois riche en hémoglobine et en sensations fortes. Deux regrets toutefois: celui de ne pas voir Manhunt programmé ce dimanche, et celui de se faire refouler à la séance de Morse faute de place. D’autant plus dommage que Morse obtiendra le Grand Prix…Bref, une journée chargée quand même, et on commence avec la séance de 9h où l’on nous projette Deadgirl, le premier film américain que l’on verra aujourd’hui.




Deadgirl commence comme une chronique adolescente au sein d’un lycée américain typique, et pose une ambiance calme et riche. On pense évidemment au sublime Tous les Garçons aiment Mandy Lane présenté l’an passé, mais Deadgirl va se diriger dans une toute autre direction. Lorsque Rickie et JT décident d’aller picoler dans un endroit tranquille, ils optent pour l’hôpital désaffecté qui se trouve aux abords de la ville. Lorsqu’ils arrivent devant cette immense bâtisse, la chaleur estivale va rapidement céder la place à une ambiance bien plus inquiétante. L’architecture de l’hôpital est imposante, et ses longs couloirs semblent chargés d’un passé oppressant. Rickie et JT se baladent dans cet environnement séculaire avec leur innocence adolescente, jusqu’à ce qu’ils arrivent devant une lourde porte dans les sous-sols, qui va les conduire à quelque chose d’inimaginable: une femme nue, apparemment attachée ici depuis des années.


Cette descente dans les méandres de la bâtisse symbolise l’exploration de leur propre esprit que sont en train de faire Rickie et JT, et la découverte de cette femme dans les sous-sols va réveiller leurs pulsions primaires. La première idée est de la libérer, mais une seconde idée surgit rapidement: et si on la gardait pour nous? Deadgirl pose des questions complexes et très délicates sur la nature humaine, et va dérouler son récit en l’axant sur les deux visions contradictoires des deux protagonistes principaux. Et en usant d’un élément fantastique, les réalisateurs Marcel Sarmiento et Gadi Harel vont pousser leur exploration de la psyché humaine en abordant le thème tabou de la nécrophilie.


Deadgirl éclaire des zones bien obscures, mais heureusement il ne se complaît pas dans une ambiance glauque comme pourrait le laisser croire le point de départ. Il est ponctué de traits d’humour noir participant activement à la tension, et le film s’avère une bonne surprise. Même s’il n’évite pas certaines longueurs et quelques bavardages inutiles, il pose une intrigue originale bénéficiant d’une belle mise en scène, convoquant le teenage movie et le film d’horreur en équilibrant ces deux aspects. Un film à l'ambiance réussie, agrémenté de quelques passages gores surprenants. Une bonne petite surprise pour démarrer la journée…