
Sorti le 19 août
Après un diptyque Kill Bill ennuyeux à mourir et un Boulevard de la Mort sympathique mais en-dessous des attentes suscitées par le réalisateur, Quentin Tarantino retrouve enfin un rythme de croisière perdu depuis Jackie Brown. Ces Basterds sont bien jouissifs, et sa vision très personnelle de l’occupation allemande vaut vraiment le détour.
Il faut évidemment clarifier 2-3 petits détails au départ : si la bande-annonce laissait augurer d’un spectacle bourrin et sanglant, il n’est pas seulement question de cela, et bien que certaines scènes soient bien jouissives niveau violence, Tarantino se tourne vers un récit historique dense et captivant. Et si Brad Pitt semble être la tête d’affiche du film, il se fait littéralement voler la vedette par Christoph Waltz dans le rôle du colonel nazi Hans Landa.

Les pellicules de Tarantino sont reconnaissables à sa manière de glisser des références, picturales ou musicales, à tout un pan cinématographique qu’il affectionne. L’ouverture du film à la Sergio Leone (la musique est signée Morricone) plonge immédiatement le spectateur dans une ambiance tendue, que ne démentira pas le long dialogue qui fera suite. La tension est palpable entre le vicieux colonel Landa et le fermier français, et Tarantino parvient à créer un puissant malaise grâce à une mise en scène jouant intelligemment sur la temporalité, et à des acteurs excellents.
L’acteur autrichien Christoph Waltz, aperçu dans Inspecteur Derrick ou Rex, Chien Flic, trouve ici un rôle à la mesure de son talent. Sa gestuelle, son sourire inquiétant, sa fausse bonhomie, tout est là pour composer un nazi de la pire espèce, et il semble prendre son pied à créer ce personnage impitoyable. Sa prestation est telle qu’elle éclipse celles de ses partenaires, et la véritable vedette du film, c’est lui. Ses dialogues sont excellents de subtilité et de double sens, et le changement de langue du début n’est qu’une des bonnes idées du film. Christoph Waltz est tout simplement énorme !

Comme d’habitude, Tarantino aime prendre son temps, et les 2h33 du film ne sont pas de trop pour raconter cette lutte contre l’oppresseur nazi. La multitude des personnages peut se développer grâce à la longueur du film, et le scénariste-réalisateur (aidé à l’écriture par Tom Tykwer, réal de L’Enquête- the International) se lâche sur la galerie qu’il a convié à sa petite sauterie germanique. Mélanie Laurent est magnifique dans son rôle de résistante juive, Eli Roth (le réal de Cabin Fever et Hostel) s’amuse comme un petit fou à tabasser du nazillon, Diane Kruger joue une actrice allemande avec sa classe habituelle, Mike Myers est de passage en militaire anglais, et la boucle est bouclée avec la participation d’Enzo G. Castellari dans le rôle d’un officier nazi, puisqu’il est le réalisateur d’un certain Une Poignée de Salopards réalisé en 1978, dont le titre original est The inglorious Bastards…
La mise en scène de Quentin Tarantino est exceptionnelle, et l’on assiste à un spectacle totalement captivant. Sa capacité à modifier le rythme des séquences est géniale, notamment dans celle de la taverne, où la lenteur contribue à une tension remarquable, et où il se permet un simple passage plus rapide et cinglant en collant un flashback de quelques secondes avant de revenir à la tension de départ. Une maîtrise formelle indéniable pour un résultat captivant et jouissif. Tarantino revient en pleine forme avec cette évocation barrée du nazisme, à la portée dramatique puissante et au traitement résolument atypique.
